9h30. Délégation du personnel. les organisations syndicales s’installent autour de la table. La direction commence à lire les premières questions. L’atmosphère est tendue. Dans les différents départements, les conditions de travail se sont terriblement dégradés. Un délégué nous fait part de la lettre d’une employée dans laquelle est évoqué un ras le bol et une envie de mettre fin à ses jours.
Le sous directeur ne semble pas vraiment touché par la nouvelle. Je suis mal à l’aise. A ma droite, un homme explique que son service est dans l’impossibilité de travailler correctement à la numérisation des documents car il manque de personnel et d’un scanner réclamé depuis 5 ans. Je me retourne vers lui, croyant à un lapsus
– 5 ans ?
– Oui 5 ans. et il n’y a pas de quoi sourire. l’homme s’adressait au sous directeur.
Ce dernier réagit. Il nous balance un discours convenu et aborde de nouvelles méthodes de travail pour améliorer les conditions de travail. « La méthode Lean sera appliqué avec la concertation des gens du terrain… » Méthode Lean ? Il y a peu de temps je m’étais intéressé à cette démarche en farfouillant wikipédia :
L’école de gestion de la production dite lean (littéralement : « maigre », « sans gras », « dégraissée », parfois traduite par « gestion sans gaspillage »1 ou par « gestion allégée » 2) recherche la performance (en matière de productivité, de qualité, de délais, et enfin de coûts) par l’amélioration continue et l’élimination des gaspillages (muda en japonais), au nombre de sept : production excessive, attentes, transport et manutention inutiles, tâches inutiles, stocks, mouvements inutiles et production défectueuse. L’école de gestion lean trouve ses sources au Japon dans le Toyota Production System (TPS)3. Adaptable à tous les secteurs économiques, le lean est actuellement principalement implanté dans l’industrie (et surtout l’industrie automobile).
Nous sommes un organisme administratif. Appliquer cette méthode me semble suspect. d’autant plus que les conditions de travail sont rarement améliorés. D’une nature timide, je me pousse à prendre la parole :
– Je pense qu’il y a un gros décalage entre la théorie et la réalité du terrain, La méthode Lean a rarement aidé les employés à se sentir mieux. En plus, vous faites appel à un prestataire extérieur pour appliquer cette méthode. ça nous coûte de l’argent.
– On aurait pu acheter un scanner avec, réagit un autre délégué.
Le sous directeur ne répondra rien et passera à une autre question. En sortant de réunion, je repensais à ces entreprises comme France Télécom où les suicides se sont succédés. Contrairement à cette boite, dans mon entreprise, nous n’avons pas un management par la peur, mais par le mépris. C’est différent mais le résultat peut être le même.